mercredi 25 novembre 2009

Entretien avec Madame Boravy


Que s'est-il passé entre vous ? Qu'avez-vous fait de votre amour ? Qu'attendez-vous pour le nommer, ce puissant sentiment, ce sentiment horrible qui vous envahit totalement ? Cessez de pleurer sur votre sort, sachez reconnaître la vérité, la vérité nue, la vérité crue. Regardez un instant à quoi ressemble votre vie. Cessez de vous leurrer sur votre capacité à haïr, car oui vous le haïssez. Vous le haïssez mais vous ne pouvez supporter que ce sentiment soit en vous. Depuis des années, vous vous effacez chaque jour davantage, vous finissez par vous confondre avec les murs de votre chambre, gris et rugueux, vous respirez à peine, votre voix aussi s'est éteinte. Au lieu de laisser éclore votre vraie nature, vous vous faites une raison, vous gagnez votre ciel, vous croyez toucher à quelque perfection. A force de vous effacer, vous disparaissez, plus rien à convoiter, rien à attendre, rien à espérer, vous vous résignez, vous vous dénigrez. Vous n'êtes plus aux yeux de tous, qu'une pauvre petite chose. Vous vous persuadez qu'un jour arrivera ici-bas ou au-delà où quelqu'un viendra, pour vous sauver. Vous attendez votre sauveur, mais seule vous pouvez vous sauver. Vous priez -Au nom du père-, les non dupes errent- vous voudriez sauver votre âme, à défaut de sauver votre vie. Et dans l'épaisseur de vos nuits, vous rêvez quelque fois à ce frémissement qui donnerait tout à coup un goût exquis à vos jours si gris.

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